vendredi 18 janvier 2013

La victoire de Benjamin Netanyahou étant une quasi-certitude aux élections législatives du 22 janvier, reste à savoir jusqu’où, vers la droite et l’extrême droite, la prochaine coalition gouvernementale sera prête à aller ?

Benjamin Netanyahou peut-il gouverner encore plus à droite ?
© AFP (Archive)

La victoire de Benjamin Netanyahou étant une quasi-certitude aux élections législatives du 22 janvier, reste à savoir jusqu’où, vers la droite et l’extrême droite, la prochaine coalition gouvernementale sera prête à aller ?

Par Gallagher FENWICK , correspondant à Jérusalem (vidéo)
Sylvain ATTAL (texte)
Jusqu’où, vers la droite et l’extrême droite, la prochaine coalition gouvernementale ira-t-elle ? La question n’intéresse pas seulement les Israéliens mais, comme toujours, le monde entier, en raison de l’impact sur ce que l’on n’ose plus appeler le "processus de paix".
De ce "processus" ou de ce qu’il en reste, il n'a d’ailleurs été que très peu question lors de la campagne. Guère plus d’ailleurs que de la "menace iranienne" qui était il y a quelques semaines encore le sujet de prédilection du Premier ministre. Mais il s’avère qu’il n’est pas en tête des sujets de préoccupation des électeurs et que, dès lors qu’Obama est réélu, Netanyahou ne peut plus s’en servir d’un levier sur la Maison Blanche.
En revanche, il a bel et bien été question de la colonisation, en particulier à Jérusalem, thème sur lequel la droite se livre à une surenchère nationaliste, fortement attisée, il faut bien le dire, par l’instabilité régionale perçue comme lourde de menaces potentielles pour l’État hébreu.
Le centre atomisé
La "révélation" de cette campagne, le colon nationaliste, religieux, conservateur, ancien officier des troupes d’élite (comme Netanyahou) et entrepreneur milliardaire Naftali Bennett (Habayit Hayeoudi ou "la maison des juifs"), a semé le doute chez ses partisans en laissant penser qu’il défendrait la désobéissance dans les rangs de l’armée si ordre lui était donné de démanteler une implantation juive. Il espère néanmoins confirmer, le 22 janvier, les scores impressionnants que lui promettent les sondages. Certains lui prédisent une quinzaine de députés (sur 120) à la Knesset, un nombre presque égal à celui du Parti travailliste, au coude à coude pour la deuxième place.
Si tel est le cas, Netanyahou, assuré de rester Premier ministre, devra constituer son gouvernement avec un allié gourmand et forcément envahissant. À moins qu’il ne se tourne vers le centre. Un centre atomisé en trois composantes rivales incapables de s’entendre entre elles, et encore moins avec le Parti travailliste pour fournir ce dont toute élection a par définition besoin, et qui fait cruellement défaut ici : un(e) leader de l’opposition.
Tsipi Livni (Hatnuah), Yaïr Lapid (Yesh Atid) et Shaul Mofaz (Kadima), tout comme la tête de liste travailliste Shelly Yacimovitch, courrent en ordre dispersé à la quête du "Graal" : les voix de la classe moyenne laïque favorable à la solution à deux États, victime de la politique économique de Netanyahou, mais…complètement démobilisée et désespérée de voir son camp offrir une alternative crédible à Netanyahou. Ce bloc représente potentiellement une force équivalente au Likoud. C’est là que se trouvent le plus d’indécis, mais aussi le plus d’abstentionnistes potentiels, alors que la droite, elle, est très mobilisée.
Les pauvres votent Likoud
Tout indique que Netanyahou n’a aucune idée précise en tête et qu’il fera en fonction des résultats ce qui lui semblera le mieux œuvrer à sa longévité politique. Au centre gauche, Yacimovitch a commis l’erreur d’envisager d’entrer dans un gouvernement dirigé par le Likoud avant de se raviser face à la dégringolade des intentions de vote. Elle n’a pratiquement pas parlé de la paix avec les Palestiniens, ce qui est une première pour une candidate de gauche, concentrant sa campagne sur les questions économiques et sociales, ou sociétales (le mariage gay !), dans la droite ligne des manifestations de l’été 2011, lorsque pour la première fois des centaines de milliers d’Israéliens défilèrent sur le thème de l’accès au logement et du pouvoir d’achat.
Partie avec de grandes ambitions, le pari a été perdu, comme le reconnaît le député travailliste Daniel Ben Simon : "Nous avions pensé qu’avec 900 000 Israéliens vivant sous le seuil de pauvreté, nous avions une chance de mobiliser. Mais les pauvres continuent de voter pour le Likoud. Le tribalisme de la société israélienne n’a jamais été aussi poussé". Cet ancien journaliste né au Maroc en fait directement l’expérience sur les marchés : "On me dit : Qu’est-ce que tu fous au parti des ashkénazes, tu devrais être au Likoud !".
Face à un Netanyahou qui hystérise le thème de l’antisémitisme (il ne parle pas seulement des Israéliens mais des juifs menacés aussi bien à Jérusalem qu’à Toulouse), les autres candidats se réclamant d’un Israël ouvert au monde et moderne sont sans prise. "Rien ne l’atteint, observe impuissant Ben Simon, ni les mauvaises relations avec l’allié américain, pas même l’accusation de gâchis de 11 milliards de dollars par l’ancien Premier ministre Olmert en dépenses inutiles pour préparer la guerre à l’Iran, bien plus qu’il ne faudrait pour corriger les inégalités."
Plus religieux, plus nationaliste, plus messianiste, plus anxieux aussi, tel est le visage qu’Israël pourrait montrer dès le 23 janvier. Qui lui tendra un miroir ?

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